JEAN JACQUES ROUSSEAU
EXTRAIT
DU PROJET
DE PAIX PERPÉTUELLE
DE MONSIEUR L’ABBÉ
DE SAINT-PIERRE/
JUGEMENT
SUR LA PAIX
PERPÉTUELLE.
[1754, automne (Extrait) - 1756, automne (Jugement); manuscrit, Extrait, Bibliothèque publique de la Ville de Neuchâtel, n̊ R 17b-24b; collection Charles Gautier, Genève; publié, Paris, mars 1761 (Extrait); manuscrit, Jugement, Neuchâtel, R. 34, fos 1-6; publié dans l’édition Moultou & Du Peyrou, Geneve, 1782; le Pléiade édition, t. III, pp. 563-600. ==Du Peyrou/Moultou 1780-89 quarto édition t. XII, pp. 1-39.]
Tunc genus humanum positis sibi consulat armis,
Inque vicem gens omnis amet.
LETTRE DE M. ROUSSEAU À M. DE BASTIDE
A Montmorenci, le 5 Décembre 1760.
J’aurois voulu, Monsieur, pouvoir répondre à l’honnêteté de vos sollicitions, en concourant plus utilement à votre entreprise; mas vous savez ma résolution, & faute de mieux, je suis réduit, pour vous complaire, à tirer de mes anciens barbouillages le morceau ci-joint, comme le moins indigne des regards du Public. Il y a six ans que M. le Comte de Saint-Pierre m’ ayant confié les manuscrits de feu M. l’Abbé son oncle, j’avois commencé d’abréger ses écrits, afin de les [2] rendre plus commodes à lire, & que ce qu’ils ont d’utile fût plus connu. Mon dessein étoit de publier cet abrégé en deux volumes, l’un desquels eût contenu les extraits des Ouvrages, & l’autre un jugement raisonné sur chaque projet: mais, après quelque essai de ce travail, je vis qu’il ne m’étoit pas propre & que je n’y réussirois point. J’abandonnai donc ce dessein, après l’avoir seulement exécute sur la Paix perpétuelle & sur la Polysynodie. Je vous envoie, Monsieur, le premier de ces extraits, comme un sujet inaugural pour vous qui aimez la paix, & dont les écrits la respirent. Puissions-nous la voir bientôt rétablie entre les Puissances; car entre les Auteurs on ne l’a jamais vue, & ce n’est pas aujourd’hui qu’on doit l’espérer. Je vous salue, Monsieur, de tout mon coeur.